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Gendarmerie royale du Canada

La technologie révolutionnaire : comment la science de l'ADN a transformé les enquêtes policières

Par Derek Johnston

Technologie

M. Ron Fourney, Ph. D., un scientifique de la GRC à la retraite, a pris part à deux affaires marquantes dans lesquelles la science de la génétique – alors nouvelle – a révélé de l'information déterminante.
Image par Ron Fourney

3 juin 2024

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Avertissement : agression sexuelle, décès

Deux événements marquants, à moins de dix ans d'écart, ont prouvé hors de tout doute que l'analyse génétique à des fins médicolégales était révolutionnaire. M. Ron Fourney, scientifique à la GRC, a joué un rôle clé dans ces deux affaires.

L'acide désoxyribonucléique, ou ADN, est comme le schéma chimique du corps. À l'exception des jumeaux identiques, chaque personne a un profil génétique unique, transmis par ses parents. Au départ, le typage génétique utilisé à des fins médicolégales servait à prouver des liens biologiques dans des dossiers d'immigration et pour des tests de paternité.

Une affaire criminelle historique

Au Canada, une importante percée dans le domaine du typage génétique a été réalisée dans le cadre d'une procédure pénale concernant une agression sexuelle brutale commise à l'endroit d'une veuve de 68 ans en 1988. L'accusé était Paul Joseph McNally, un homme marié de 32 ans, père de deux enfants, qui a nié à plusieurs reprises avoir été impliqué dans ce crime. Pour la première fois, des preuves génétiques établies dans un laboratoire judiciaire canadien ont mené à une condamnation criminelle.

« À mes débuts à la GRC en 1988, se souvient M. Fourney, je faisais partie d'une petite équipe spécialisée en ADN aux côtés de MM. Gary Shutler et John Waye. » Il a fait équipe avec M. Waye pour analyser les échantillons dans l'affaire McNally. « Nous avons fait les tests et avons établi une correspondance! Nous avons vérifié trois ou quatre fois, par précaution. »

MM. Waye et Fourney, tous deux détenteurs d'un doctorat, ont été embauchés par la GRC pour introduire le typage génétique dans le domaine de l'identité judiciaire. Jusque-là, la méthode privilégiée était la sérologie, le domaine d'expertise de M. Shutler. Elle permettait de relier des individus à des échantillons de liquide organique comme du sang, du sperme, de la salive ou de la sueur.

« Les analyses de sérologie permettaient tout au plus de circonscrire la liste des suspects potentiels à environ 10 % d'une population connue, dit M. Fourney. L'analyse d'ADN allait nous permettre de relier un échantillon biologique à un seul individu. »

Une preuve irréfutable

M. Fourney raconte que lorsque les résultats de l'analyse ont été présentés en cour dans l'affaire McNally, tout le monde était stupéfait. Les chances qu'au Canada, une personne autre que McNally ait le même profil génétique que lui étaient d'une sur 74 milliards.

L'avocat du suspect avait fait appel à un expert en génétique dans le but de semer le doute à l'égard des résultats de l'analyse d'ADN, mais les normes de contrôle de la qualité et de procédures appliquées dans le laboratoire de la GRC ont mis cette tentative en échec. L'expert n'a jamais comparu. McNally a soudainement plaidé coupable, puis a été condamné à sept ans de prison.

« Cette affaire a montré que nous avions maintenant une technologie insurpassable en matière d'identification humaine », ajoute M. Fourney.

Le typage génétique a révolutionné le système de justice pénale. Il a aussi eu une incidence majeure dans d'autres domaines, notamment l'identification des victimes de catastrophes naturelles ou d'autres désastres de grande envergure.

Vol 111 de la Swissair

En 1998, l'écrasement du vol 111 de la Swissair près de Peggy's Cove (Nouvelle-Écosse) a prouvé que l'analyse génétique permettait d'identifier des restes humains, même dans des circonstances extrêmement difficiles. À l'époque, c'était le plus vaste projet d'identification génétique de l'histoire du Canada — et M. Ron Fourney a dirigé l'initiative.

« Nous sentions que nous avions un rôle important à jouer pour soutenir les familles des victimes », se rappelletil.

La tâche était colossale. L'avion s'étant disloqué en frappant l'eau, des débris étaient dispersés sur plusieurs kilomètres. La titanesque opération de récupération a permis de recueillir 15 000 restes humains, difficiles à analyser pour la plupart.

Un travail laborieux

Des policiers de 12 pays ont fouillé les résidences des victimes à la recherche d'empreintes latentes et d'effets personnels sur lesquels l'ADN pourrait être prélevé. Des employés de la GRC, avec le soutien d'autres laboratoires un peu partout au pays, ont consacré un nombre incalculable d'heures à l'analyse de plus de 1 300 échantillons obtenus après l'écrasement et à la recherche de correspondances avec les effets personnels obtenus et les échantillons de référence des familles.

Finalement, l'analyse d'ADN a permis de valider l'identification de toutes les victimes qui avait été faite à partir des fiches dentaires, empreintes digitales et radiographies. Cette démarche s'est faite en un peu plus de 100 jours.

« La tâche était colossale et a durement éprouvé toutes les personnes qui s'y sont employées, admet M. Fourney. Mais nous étions motivés par le désir d'aider les familles en identifiant leurs proches après cette terrible tragédie. Dans la vie, notre plus grande dignité personnelle est notre identité. Nous devons la redonner à toute personne non identifiée ou disparue. »

Pour M. Fourney, qui est à la retraite depuis peu, l'analyse génétique a surpassé les attentes optimistes qui ont découlé des premières condamnations criminelles qu'elle a rendues possibles et de la mission de récupération des restes humains après l'écrasement du vol 111 de la Swissair. « Et ce n'est que la pointe de l'iceberg », conclutil.

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