Crimes et incidents haineux : Guide de l’enquêteur
Sur cette page
- Définitions
- Enquêter sur les crimes et les incidents haineux
- Établissement du motif de la haine : Indicateurs clés des préjugés
- Recommandations pour mener une enquête centrée sur la victime et tenant compte des traumatismes
- Considérations législatives et juridiques
- Recommandations en matière d’enquête
- Conclusion
- Ouvrages cités
- Notes en bas de page
Formats substituts et les renseignements sur les droits d’auteur
Crimes et incidents haineux : Guide de l’enquêteur (PDF, 4 370 ko)
© Sa Majesté le Roi du chef du Canada, représenté par la Gendarmerie royale du Canada, 2025
- ISBN 978-0-660-73261-9
- Numéro de catalogue PS64-236/2-2024F-PDF
Sauf avis contraire, le contenu du présent document peut, sans frais ni autre permission, être reproduit en tout ou en partie et par quelque moyen que ce soit à des fins personnelles ou publiques, mais non à des fins commerciales. La reproduction et la distribution à des fins commerciales sont interdites sans la permission de la Gendarmerie royale du Canada.
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Gendarmerie royale du Canada
73 promenade Leikin
Ottawa, Ontario, Canada
K1A 0R2
Liste des acronymes et abréviations
- 2ELGBTQI+
- bispirituel, lesbien, gai, bisexuel, transgenre, queer, intersexué et autres
- ADL
- Anti-Defamation League
- GRC
- Gendarmerie royale du Canada
- RPC
- rapport au procureur de la Couronne
Le présent guide renferme des recommandations concrètes et précises pour aider les enquêteurs à reconnaître les crimes et incidents haineux et à enquêter à leur sujet. Ces recommandations visent à donner aux enquêteurs les connaissances et les outils qui leur permettront de mieux appuyer les victimes et leur communauté, de tenir les auteurs d’incidents responsables de leurs actes et d’améliorer la qualité générale de l’intervention policière lors de crimes haineux. Le Guide fait suite au document intitulé Crimes et incidents haineux : Guide sur l’intervention initiale des policiers de première ligne.
Bien que certaines recommandations contenues dans le présent guide s’appliquent précisément aux enquêtes criminelles, il importe que les policiers comprennent l’importance d’assurer une intervention policière solide à l’appui des victimes lors d’incidents motivés par la haine. Même si ces incidents ne satisfont pas tous aux critères permettant le dépôt d’accusations criminelles, ils causent tout de même des torts considérables aux victimes et à leur communauté. Une grande partie de l’information contenue dans le présent guide s’applique donc aux appels de service qui concernent les crimes et incidents haineux.
L’information ici présentée a été tirée en grande partie d’un guide de l’enquêteur préparé par le sergent Elvis Musinovic, sous-officier responsable de l’Unité des crimes haineux en Colombie-Britannique, Section des crimes majeurs de la Division E de la Gendarmerie royale du Canada, par le gendarme détective Gregory Keall, enquêteur, Unité des crimes haineux en Colombie-Britannique et par Greg Yanicki, enquêteur supérieur, Section des crimes majeurs de la Division E de la Gendarmerie royale du Canada. Elle a été complétée par endroits par de l’information tirée de recherches universitaires et de publications de soutien aux enquêtes (les sources sont précisées dans le texte).
Dans certains cas, les procédures et les lignes directrices opérationnelles ont été adaptées de façon à pouvoir être suivies par les services de police compétents partout au Canada, avec l’aide des membres du Groupe de travail sur les crimes haineux.
Définitions
- Crime haineux
-
Un crime haineux est une infraction criminelle perpétrée contre une personne ou des biens qui est motivée, au moins en partie, par des préjugés ou de la haine fondés sur la race, l’origine nationale ou ethnique, la langue, la couleur, la religion, le sexe, l’âge, la déficience mentale ou physique, l’orientation sexuelle ou l’identité ou l’expression de genre, ou sur tout autre facteur similaire.
Les crimes haineux comprennent la violence et d’autres formes de préjudices contre des personnes ou des groupes, mais aussi certains crimes contre des biens, notamment les lieux de culte, tels que les temples, les mosquées, les synagogues ou les églises, et les objets ou lieux d’importance religieuse, comme les écoles, les centres communautaires ou les cimetières.
Parmi les exemples de crimes haineux, mentionnons les actes de violence ou à caractère hostile, comme les agressions (frapper une personne ou lui cracher dessus), et les dommages à des biens, comme les écoles ou les lieux de culte. Ces actes ciblent intentionnellement des personnes ou des groupes.
- Incident haineux
-
Les incidents haineux ont les mêmes caractéristiques que les crimes haineux, mais ils ne sont pas considérés comme des infractions criminelles aux termes du Code criminel. Ils sont définis comme des actes non criminels motivés par les préjugés et la haine contre des personnes ou des biens fondés sur la race, l’origine nationale ou ethnique, la langue, la couleur, la religion le sexe, l’âge, la déficience mentale ou physique, l’orientation sexuelle ou l’identité ou l’expression de genre, ou sur tout autre facteur similaire. En d'autres termes, les incidents motivés par la haine sont des actes ou des comportements « horribles mais légaux » qui ne constituent pas des infractions pénales et qui sont motivés uniquement ou en partie par la haine envers un groupe identifiable.
Les incidents haineux peuvent prendre la forme de propos injurieux ou racistes, d’insultes à l’encontre d’une personne en raison de sa tenue traditionnelle ou religieuse ou de la manière dont elle s’identifie (par exemple, une dispute dans un stationnement qui dégénère en insultes racistes). De tels incidents peuvent être très préjudiciables et causer du stress émotionnel et psychologique ainsi que des traumatismes. Les policiers qui interviennent à la suite d’incidents haineux doivent continuer à appliquer une approche centrée sur la victime et orienter les victimes et leur communauté vers des organisations locales qui fournissent du soutien et des services directs et adaptés à leurs besoins.
- Groupe identifiable
- En considération du fait que certains segments de la population peuvent être victimes de discrimination systémique, voire violente, et nécessiter une protection juridique spécifique, le Code criminel définit, au paragraphe 318(4), le terme « groupe identifiable » comme toute section du public qui se différencie des autres par la « couleur, la race, la religion, l’origine nationale ou ethnique, l’âge, le sexe, l’orientation sexuelle, l’identité ou l’expression de genre ou la déficience mentale ou physique ».
Enquêter sur les crimes et les incidents haineux
Tous les Canadiens ont le droit de se sentir en sécurité et de vivre sans crainte ni menace. Il est d’une importance capitale d’enquêter sur les crimes et incidents haineux pour les raisons suivantes :
- le fait d’enquêter sur les incidents haineux peut atténuer les sentiments de peur et d’anxiété pour les victimes, aider tant les services d’application de la loi que les communautés à prévenir la perpétration de crimes et empêcher les situations de dégénérer en violence ou en d’autres infractions criminelles;
- une intervention policière rapide renforce le message selon lequel les crimes et incidents haineux feront l’objet d’une enquête rigoureuse, ce qui fait en sorte
- de renforcer le sentiment de sécurité des victimes et des communautés et
- de consolider la relation de confiance entre ces dernières et la police.
Les crimes et incidents haineux peuvent entraîner des séquelles profondes, durables et plus graves que celles causées par d’autres types de méfaits. Par un effet d’entraînement, ils affectent les victimes, mais aussi l’ensemble des membres du groupe ciblé. Saisir et comprendre l’ampleur des conséquences des crimes et incidents haineux sur les communautés doivent demeurer la priorité des enquêteurs. Tout au long du processus d’enquête, les enquêteurs doivent s’efforcer de traiter les victimes, leurs familles et leurs communautés avec respect et sensibilité, et les orienter vers des organismes et des services de soutien, au besoin.
Établissement du motif de la haine : Indicateurs clés des préjugés
Les crimes et incidents haineux peuvent être motivés entièrement ou partiellement par la haine. Un crime motivé par la haine et par un autre facteur, comme l’ignorance, la peur ou un sentiment de honte ou d’impuissance, est tout de même motivé par la haine (et d’autres facteurs).
La preuve que l’acte a été motivé par la haine, entièrement ou en partie, est l’une des considérations les plus importantes pour l’enquête et l’ensemble de la preuve puisque les critères à respecter pour déposer des accusations sont extrêmement stricts. Il est donc particulièrement important de prendre en note les réponses aux questions fondamentales (qui, quoi, quand, où, pourquoi et comment) durant l’enquête et la poursuite judiciaire lorsque les infractions pourraient avoir été motivées par la haine.
Enquêter sur les motivations d’un suspect peut aider à déterminer si ses actes ont été motivés, en tout ou en partie, par la haine. La présence de l’un ou l’autre de ces indicateurs ne permet pas nécessairement de confirmer que l’incident a été motivé par la haine ou des préjugés, mais peut révéler la nécessité d’approfondir l’enquête sur les motifs.
Un crime motivé par la haine et par un autre facteur, comme l’ignorance, la peur ou un sentiment de honte ou d’impuissance, est tout de même motivé par la haine (et d’autres facteurs).
Considérations liées à la victime, à l’auteur de l’incident et à la situation
- La victime fait-elle partie d’un groupe identifiable?
-
Perceptions de la victime et des témoins au sujet du crime ou de l’incident et des motivations possibles.
Remarque : Les entrevues doivent s’effectuer conformément aux politiques, mais les enquêteurs ne doivent pas demander directement aux victimes et aux témoins s’ils croient que l’incident constitue un crime haineux, mais plutôt s’ils ont une idée des raisons pour lesquelles l’infraction a été commise.
- Le suspect a-t-il tenu des propos (verbalement ou par écrit, en personne ou en ligne), utilisé des symboles ou posé des gestes qui témoignent de la haine avant, durant ou immédiatement après l’incident?
- Le suspect a-t-il déjà été lié à un crime ou un incident motivé par la haine?
- Le suspect et la victime font-ils partie de groupes différents fondés sur la race, l’origine ethnique, la religion, l’origine nationale, l’orientation sexuelle, le genre, l’identité ou l’expression de genre ou la déficience?
- Est-ce que des incidents semblables ont déjà eu lieu au même endroit ou dans le même quartier, ce qui pourrait révéler une tendance ou une intensification des infractions?
- La victime était-elle facilement identifiable comme membre de sa communauté, par exemple par des vêtements ou symboles (habit religieux, drapeaux associés à la communauté 2ELGBTQI+) ou par sa conduite (se rendre à un lieu de culte ou assister à des événements culturels et des célébrations)?
- L’incident coïncidait-il avec une fête ou une date significative pour la victime ou l’auteur suspecté de l’infraction (par exemple, une fête ou un événement religieux ou l’anniversaire d’un événement extrémiste ou haineux antérieur, souvent présenté de façon sensationnaliste, perpétré au Canada ou ailleurs, afin de le reproduire ou d’y rendre hommage)?
- Y a-t-il des preuves de l’implication de groupes haineux organisés ou de leurs membres?
- Y a-t-il d’autres motifs apparents liés à l’infraction ou l’incident (par exemple, gain financier)?
Considérations liées aux infractions contre les biens
- Quelle est la fonction des biens touchés? L’incident cible-t-il un lieu d’importance culturelle ou religieuse (comme un lieu de culte ou un cimetière) ou une installation communautaire (comme un centre culturel ou un monument historique)?
- Y a-t-il récemment eu à cet endroit un événement en faveur d’un groupe identifiable (par exemple, un événement de la fierté tenu dans le centre communautaire qui a plus tard été vandalisé)?
-
La propriété a-t-elle déjà fait l’objet d’autres infractions motivées par la haine?
Remarque : Vérifiez auprès de l’analyste de la criminalité de votre service afin de connaître les tendances liées aux graffitis ou d’autres méfaits visant des biens dans les alentours.
- Dans toute enquête sur des méfaits impliquant des graffitis, assurez-vous de déterminer le sens de tout symbole utilisé ou reproduit et le choix du moment de l’infraction.
Éléments importants à prendre en considération
- Il faut étudier attentivement chaque cas afin de chercher des preuves qui indiquent clairement que le crime était motivé par la haine ou les préjugés.
- Les crimes haineux peuvent être perpétrés par des personnes qui semblent appartenir à la même culture ou au même milieu que la victime. Il faut écouter attentivement afin de bien comprendre le point de vue de la victime : il se peut que des personnes s’attaquent les unes les autres en raison de facteurs invisibles, comme une différence de religion ou de région au sein d’une même culture.
- Même si le suspect de l’infraction s’est trompé en croyant que la victime était membre du groupe ciblé, l’infraction demeure un crime motivé par la haine ou les préjugés si son auteur était motivé par la haine ou les préjugés à l’égard de ce groupe.
- Si un incident est initialement considéré comme étant motivé par la haine ou les préjugés et qu’il s’avère par la suite que ce n’est pas le cas, tous les rapports doivent refléter ce changement. Inversement, si un incident n’est pas initialement considéré comme étant motivé par la haine ou les préjugés et qu’il s’avère par la suite qu’il l’est, tous les rapports doivent refléter ce changement.
Base de données sur les symboles de haine
Il existe deux bases de données répertoriant les symboles, personnages et les thèmes haineux :
- The Toronto Holocaust Museum's Online Hate Research and Education Project : Hatepedia Guide to Online Hate (disponsible en anglais seulement)
- L'Anti-Defamation League (ADL) : Hate on Display Hate Symbols Database (disponsible en anglais seulement)
Les enquêteurs qui souhaitent en savoir plus sur les groupes haineux actifs sur leur territoire de compétence devraient communiquer avec l’équipe de leur service de police responsable des crimes haineux.
Recommandations pour mener une enquête centrée sur la victime et tenant compte des traumatismes
Pour les services de police, il est essentiel de comprendre les conséquences des crimes et incidents haineux sur les victimesnote en bas de page 1, leurs familles et la communauté dans son ensemble. L’approche centrée sur la victime et tenant compte des traumatismes permet d’offrir des services plus éclairés, sensibles et respectueux.
Outre les préjugés subis par les victimes, leurs familles et leurs communautés, les crimes et les incidents haineux entraînent aussi des conséquences plus vastes sur le plan sociétal. Par exemple, les victimes et les communautés pourraient perdre confiance dans les services de police et le système de justice pénale lorsque des crimes haineux ne sont pas traités.
Les crimes et les incidents haineux peuvent avoir une grande incidence sur la coexistence saine et positive entre les différents segments d’une communauté. L’approche centrée sur la victime et tenant compte des traumatismes fait en sorte que les droits des victimes, la sécurité du public et la réparation des torts soient placés en priorité dans le cadre de toute enquête.
Approche centrée sur la victime
L’approche centrée sur la victime met l’accent sur les droits, la sécurité et le bien-être de la victime tout en veillant à respecter, de manière empathique, sensible et sans jugement, les besoins exprimés par les victimes et leurs choix au cours d’une enquête. Cette approche permet également de soutenir les victimes de crimes haineux lorsque l’intersectionnalité des identités est également un facteur.
L’intersectionnalité désigne le fait que de multiples caractéristiques identitaires (race, origine ethnique, religion, genre, orientation sexuelle, etc.) se croisent et donnent lieu à des expériences uniques de discrimination et/ou de privilège. Les policiers doivent veiller à tenir compte de tous les aspects de l’identité de la victime lorsqu’ils enquêtent sur d’éventuels crimes et incidents haineux.
Droits des victimes
La Charte canadienne des droits des victimes définit une victime comme tout « particulier qui a subi des dommages – matériels, corporels ou moraux – ou des pertes économiques par suite de la perpétration ou prétendue perpétration d’une infraction ». Elle accorde aux victimes d’actes criminels le droit à l’information, à la protection, à la participation et à la réparation. Les enquêteurs qui souhaitent communiquer ces droits aux victimes peuvent consulter la page intitulée Charte canadienne des droits des victimes sur le site Web du Bureau de l’ombudsman fédéral des victimes d’actes criminels.
La Charte canadienne des droits des victimes définit une victime comme tout « particulier qui a subi des dommages – matériels, corporels ou moraux – ou des pertes économiques par suite de la perpétration ou prétendue perpétration d’une infraction ».
Les enquêteurs peuvent appuyer les victimes des façons suivantes :
- Rester calme, objectif et faire preuve d’empathie; traiter les victimes avec respect et de manière professionnelle et personnalisée.
- Toujours demander à la victime comment elle veut qu’on s’adresse à elle, plutôt que de présumer de son identité en fonction de son apparence.
- Répondre au besoin de la victime d’être entendue, crue et prise au sérieux.
- Si la victime ne semble pas vouloir coopérer ou affiche un comportement agressif, se souvenir qu’il peut s’agir d’une réaction au traumatisme causé par le crime haineux. Si possible, donner à la victime du temps et de l’espace pour lui permettre de se ressaisir.
- Dans la mesure du possible, s’assurer que les victimes ont le soutien de leurs amis, de leur famille, de chefs spirituels, de dirigeants communautaires ou d’aînés tout au long du processus de justice pénale.
- Demander aux victimes de quoi elles ont besoin et comment les policiers peuvent leur venir en aide; les enquêteurs devraient respecter les préférences des victimes, leur donner l’information sur les services d’aide aux victimes et les aider à obtenir ces services, si nécessaire.
- Rassurer les victimes en leur disant qu’elles ne sont pas responsables de ce qui est arrivé, que la police mènera une enquête rigoureuse sur le crime et tiendra le coupable responsable de ses actes, et que toutes les mesures possibles seront prises pour protéger la sécurité des victimes.
- Utiliser les techniques d’interrogatoire tenant compte des traumatismes, car les techniques traditionnelles peuvent traumatiser davantage les victimes. Pour utiliser les techniques d’interrogatoire tenant compte des traumatismes :
- Commencer par obtenir une version « pure » des événements – une déclaration ininterrompue de la victime, mot pour mot.
- Ramener la victime à des éléments clés de l’événement en utilisant des questions ouvertes (ne pas poser de questions suggestives qui pourraient contaminer une déclaration de victime ou de témoin).
- Une fois que la déclaration de la victime est terminée, poser des questions de suivi au besoin (voir les lignes directrices pour obtenir de l’information sur la motivation d’un crime haineux et sur les indicateurs de ces types de crimes présentés ci-dessus), sans lui donner d’indice sur ce qui est important du point de vue d’un enquêteur.
-
Encourager les victimes à remplir une déclaration de victime sur les conséquences du crime, qui leur donne une voix dans le processus du système de justice pénale en leur permettant de décrire l’impact physique, émotionnelle et économique de l’infraction. Les membres des communautés touchées doivent aussi être encouragés à remplir des déclarations décrivant l’impact sur la collectivité.
Nota : Pour un aperçu plus détaillé des techniques d’interrogatoire tenant compte des traumatismes élaborées pour les victimes d’agressions sexuelles, y compris les principes de base sur les questions à poser et à éviter qui sont les mêmes dans le contexte des crimes haineux, voir le guide Successful Trauma Informed Victim Interviewing (disponsible en anglais seulement, PDF, 770 ko) de l’Association internationale des chefs de police.
- Encourager les victimes et les témoins à raconter ce qui s’est passé dans leurs propres mots et les laisser se défouler et exprimer leurs émotions au sujet de l’incident ou du crime.
Ce que les enquêteurs devraient éviter :
- Avoir des communications ou des interactions abruptes ou pressées avec les victimes.
- Dire à la victime qu’ils savent ce qu’elle ressent.
- Demander directement à la victime ou aux témoins s’ils croient que l’incident était motivé par la haine.
- Critiquer le comportement de la victime.
- Faire des suppositions sur le statut de la victime en tant que membre d’un groupe identifiable, sa culture, son origine ethnique, sa religion, son orientation sexuelle ou son identité de genre. La question de savoir si un crime haineux a été commis dépend du motif du suspect, et non du statut de la victime.
- Laisser son jugement personnel au sujet de l’identité, du comportement, du mode de vie ou de la culture de la victime influer sur son objectivité.
- Employer des termes offensants, subjectifs ou désuets.
- Minimiser la gravité de l’incident, surtout s’il ne satisfait pas aux critères permettant de déposer des accusations, s’il n’a pas entraîné un préjudice grave ou si l’auteur est un jeune contrevenant.
Approche tenant compte des traumatismes
L’approche tenant compte des traumatismes consiste à offrir des services et de l’aide tout en tenant compte de ce que la personne ayant subi un traumatisme a vécu et des torts ayant été causés. Cette approche vise à permettre aux victimes de se sentir en sécurité, de savoir qu’elles ont des choix et qu’elles sont en contrôle de leur situation.
Les conséquences pour les victimes de crimes haineux sont vastes et dépendent de plusieurs facteurs, comme les autres crimes ou incidents dont la victime a été la cible par le passé, la nature du crime ou de l’incident, la gravité du crime et des blessures, les expériences passées de discrimination, l’accessibilité à un soutien familial, social ou fondé sur la foi et la nature intersectionnelle de l’identité d’une personne qui peut aggraver et intensifier les torts subis.
Il est essentiel que la police et les organisations adoptent une approche intersectionnelle lorsqu’elles interviennent dans des cas de crimes et d’incidents haineux afin de reconnaître ces facteurs, de traiter efficacement les nuances du préjudice et d’apporter aux victimes le soutien approprié.
Les traumatismes causés par des crimes et incidents haineux entraînent souvent les réactions suivantes :
- détresse émotionnelle et psychologique;
- état de choc et incrédulité;
- sentiment de colère qui peut être dirigé contre l’accusé, la police et la société;
- dépression, anxiété et idées suicidaires;
- sentiment d’isolement extrême;
- diminution du sentiment de sécurité;
- sentiment accru de vulnérabilité et peur d’être à nouveau victime d’un incident ou d’un crime haineux;
- sentiment de honte, d’humiliation et de désespoir;
- hypervigilance et comportement d’évitement à l’égard des personnes, des lieux et des situations perçus comme étant potentiellement dangereux;
- dissimulation de certains aspects de l’identité sociale (par exemple, ne pas porter de vêtements ou de symboles religieux);
- consommation abusive d’alcool ou de drogues et comportements autodestructeurs.
Considérations législatives et juridiques
La Charte canadienne des droits et libertés
La Charte canadienne des droits et libertés (ci-après « la Charte ») énonce les droits civils et humains garantis aux citoyens canadiens, aux résidents permanents et aux nouveaux arrivants au Canada.
L’un de ces droits est la liberté d’expression, qui est énoncée à paragraphe 2b) et consacre la « liberté de pensée, de croyance, d’opinion et d’expression, y compris la liberté de la presse et des autres moyens de communication ».
Cela signifie que ceux qui souhaitent manifester pacifiquement ou exprimer un point de vue ont le droit de le faire, même si leur point de vue peut être considéré comme offensant. Toutefois, ces libertés ne sont pas absolues. Le paragraphe 1 de la Charte stipule ce qui suit : « La Charte canadienne des droits et libertés garantit les droits et libertés qui y sont énoncés. Ils ne peuvent être restreints que par une règle de droit, dans des limites qui soient raisonnables et dont la justification puisse se démontrer dans le cadre d’une société libre et démocratique ». Autrement dit, il y a des limites aux propos offensants que l’on peut légalement tenir.
La Cour suprême du Canada a maintenu des restrictions quant aux formes d’expression jugées contraires à l’esprit de la Charte.
La Charte canadienne des droits et libertés garantit les droits et libertés qui y sont énoncés. Ils ne peuvent être restreints que par une règle de droit, dans des limites qui soient raisonnables et dont la justification puisse se démontrer dans le cadre d’une société libre et démocratique.
Exemples de restrictions à la liberté d’expression
Les discours haineux peuvent prendre de nombreuses formes. Ils peuvent notamment être racistes (contre les Noirs, les Asiatiques ou les Autochtones, par exemple), misogynes, homophobes, transphobes, antisémites, islamophobes ou associés au suprémacisme blanc. Il est important de souligner que les discours haineux ne peuvent être dirigés que contre des personnes ou des groupes de personnes, et non contre des idées, des philosophies, des partis politiques ou des États et leurs institutions, symboles et représentants.
Une décision rendue par le Tribunal canadien des droits de la personne en 2006 (Warman c. Kouba) a établi onze « thèmes distinctifs de messages haineux » qui sont souvent utilisés par les contrevenants dans leurs propos à l’égard des groupes ciblés.
Les groupes ciblés sont :
- décrits comme constituant une puissante menace qui prend le contrôle des principales institutions de la société et qui prive les autres de leur gagne-pain, de leur sécurité, de leur liberté de parole et de leur bien-être général;
- décrits comme des groupes qui s’en prennent notamment aux enfants, aux personnes âgées et aux personnes vulnérables;
- tenus responsables des problèmes actuels de la société et du monde;
- décrits comme étant foncièrement dangereux ou violents;
- décrits comme des groupes dont les membres n’ont aucune qualité qui rachète leurs défauts et sont foncièrement mauvais;
- déshumanisés par la comparaison de ses membres à des animaux, à de la vermine, à des excréments et à d’autres substances indésirables.
Les messages peuvent souvent inclure :
- des « histoires vraies », des reportages, des photos et des références provenant de sources prétendument fiables afin de faire des généralisations négatives sur le groupe ciblé;
- l’idée que seul le bannissement, la ségrégation et l’éradication de ce groupe de personnes permettront de sauver les autres du préjudice causé par ce groupe;
- un langage incendiaire et méprisant afin de créer un climat de haine et de mépris extrême;
- la banalisation ou la glorification des persécutions ou des tragédies dont ont été victimes les membres du groupe ciblé;
- des appels à la violence envers le groupe ciblé.
Tous ces éléments constituent une atteinte à l’estime de soi et à la dignité inhérente membres du groupe visé.
Les crimes haineux et le Code criminel du Canada
Généralités
Le Code criminel contient un certain nombre de dispositions relatives aux crimes fondés sur la haine :
- Infractions liées à la propagande haineuse
- Paragraphe 318 – Encouragement au génocide
- Paragraphe 319(1) – Incitation publique à la haine
- Paragraphe 319(2) – Fomenter volontairement la haine
- Paragraphe 319 (2.1) – Fomenter volontairement l’antisémitisme
- Infractions liées à la propagande haineuse - Mandat de saisie
- Paragraphe 320(1) – Mandat de saisie (publications)
- Paragraphe 320.1(1) - Mandat de saisie (ordinateurs)
- Paragraphe 430(4.1) – Méfait : biens religieux, établissements d’enseignement, etc.
- Paragraphes 320.101 à 320.104; 273.3(1) – Thérapie de conversion
- Alinéa 718.2(a)(i) – Principes de détermination de la peine
Dispositions du Code criminel
1. Infractions liées à la propagande haineuse
La propagande haineuse est définie au paragraphe 320(8) du Code criminel comme suit : « Tout écrit, signe ou représentation visible qui préconise ou fomente le génocide, ou dont la communication par toute personne constitue une infraction aux termes de l’article 319 ».
Au Canada, les termes « propagande haineuse » et « discours haineux » sont souvent utilisés pour désigner des propos haineux tenus en public et visant un groupe identifiable. Ces propos peuvent être tenus oralement ou par écrit, par exemple en distribuant des tracts ou des affiches, en prenant la parole en public ou en écrivant là où le public a accès, y compris en ligne ou sur les plateformes de médias sociaux. Lorsqu’un discours haineux bascule dans la criminalité, c’est généralement qu’il consiste à fomenter volontairement la haine, en contravention au paragraphe 319(2) du Code criminel.
Au Canada, très peu de suspects sont accusés en vertu du paragraphe 319(2) chaque année, puisque le procureur de la Couronne doit obtenir l’approbation du procureur général de la province pour procéder par voie d’accusation.
Les mesures de répression de l’incitation publique à la haine (paragraphe 319[1] du Code criminel) sont généralement prises en temps réel, lorsque la police a des motifs raisonnables de croire que les propos haineux d’un suspect entraîneront une perturbation de l’ordre public, par exemple une émeute.
Paragraphe 318 – Encouragement au génocide
Quiconque préconise ou fomente le génocide est coupable d’un acte criminel passible d’un emprisonnement maximal de cinq ans.
Le génocide s’entend de l’un ou l’autre des actes suivants commis avec l’intention de détruire totalement ou partiellement un groupe identifiable, à savoir :
- le fait de tuer des membres du groupe; ou
- le fait de soumettre délibérément le groupe à des conditions de vie propres à entraîner sa destruction physique.
Considérations importantes :
- Les poursuites ne peuvent être engagées qu’avec l’accord du procureur général.
- Cette infraction peut servir de fondement à une autorisation d’intercepter des communications privées (paragraphe 183).
- Il n’est pas nécessaire de prouver qu’un génocide a été commis.
- L’intention coupable requise pour prouver un crime réside dans l’intention de provoquer autrui ou de l’inciter directement à commettre un génocide.
Paragraphe 319(1) – Incitation publique à la haine
Quiconque, par la communication de déclarations en un endroit public, incite à la haine contre un groupe identifiable, lorsqu’une telle incitation est susceptible d’entraîner une violation de la paix, est coupable
- soit d’un acte criminel et passible d’un emprisonnement maximal de deux ans; ou
- soit d’une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire.
Considérations importantes :
- Il s’agit d’une infraction en temps réel dont un policier est témoin dans un lieu public et qui est susceptible d’entraîner une violation de la paix.
- Pour établir qu’un crime est commis, l’individu doit encourager quelqu’un d’autre à haïr un groupe identifiable ou l’inciter à adopter un comportement violent ou illégal à l’égard d’un groupe identifiable.
- Ces situations peuvent se produire lors de manifestations ou de contre-manifestations impliquant des groupes identifiables, dans des lieux publics en période d’agitation sociale ou de guerre.
Paragraphe 319(2) – Fomenter délibérément la haine
Quiconque, par la communication de déclarations en un endroit public, incite à la haine contre un groupe identifiable, lorsqu’une telle incitation est susceptible d’entraîner une violation de la paix, est coupable
- soit d’un acte criminel et passible d’un emprisonnement maximal de deux ans; ou
- soit d’une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire.
Considérations importantes :
- Les poursuites ne peuvent être engagées qu’avec l’accord du procureur général.
- L’accusé avait pour intention ou objectif conscient de fomenter la haine ou prévoyait qu’il était certain ou moralement certain que la fomentation de la haine résulterait des déclarations qu’il a communiquées.
- Il n’est pas suffisant que le message soit offensant ou que les déclarations déplaisent au juge des faits.
- Les déclarations ont été communiquées par téléphone, par radiodiffusion ou par tout autre moyen de communication sonore ou visuel.
- Une déclaration comprend tout propos verbal ou écrit, signe, geste, représentation visible ou enregistrement sonore.
- Le suspect doit inciter quelqu’un d’autre à la haine en dehors d’une conversation privée.
- Fomenter consiste à susciter ou entretenir un sentiment ou une action néfaste. Il s’agit de plus qu’un simple encouragement; seules les formes les plus intenses d’aversion tombent sous le coup de cette disposition.
Quatre moyens de défense pouvant être opposés :
- Les déclarations sont vraies.
- Une opinion ou un argument a été exprimé de bonne foi et concernait un sujet religieux ou était basé sur une croyance en un texte religieux.
- Les déclarations se rapportaient à un sujet d’intérêt public et étaient considérées pour des motifs raisonnables comme vraies.
- Les déclarations avaient pour but d’attirer l’attention sur des questions qui suscitent des sentiments de haine à l’égard d’un groupe identifiable et ont été faites de bonne foi dans le but de les faire disparaître.
Paragraphe 319(2.1) – Fomenter volontairement l’antisémitisme
Quiconque, par la communication de déclarations autrement que dans une conversation privée, fomente volontairement l’antisémitisme en cautionnant, en niant ou en minimisant l’Holocauste est coupable :
- soit d’un acte criminel et passible d’un emprisonnement maximal de deux ans;
- soit d’une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire.
Considérations importantes :
- Les poursuites ne peuvent être engagées qu’avec l’accord du procureur général.
Quatre moyens de défense pouvant être opposés :
- Les déclarations sont vraies.
- Une opinion ou un argument a été exprimé de bonne foi et concernait un sujet religieux ou était basé sur une croyance en un texte religieux.
- Les déclarations se rapportaient à un sujet d’intérêt public et étaient considérées pour des motifs raisonnables comme vraies.
- Les déclarations avaient pour but d’attirer l’attention sur des questions qui suscitent des sentiments antisémites à l’égard des Juifs et ont été faites de bonne foi dans le but de les faire disparaître.
2. Infractions liées à la propagande haineuse – Mandat de saisie
Paragraphe 320(1) – Mandat de saisie (Publications)
Un juge convaincu, par une dénonciation sous serment, qu’il existe des motifs raisonnables de croire qu’une publication, dont des exemplaires sont gardés aux fins de vente ou de distribution dans un local du ressort du tribunal, est de la propagande haineuse, émet, sous son seing, un mandat autorisant la saisie des exemplaires.
Paragraphe 320.1(1) – Mandat de saisie (ordinateurs)
Le juge peut, s’il est convaincu par une dénonciation sous serment qu’il y a des motifs raisonnables de croire qu’il existe une matière — qui constitue de la propagande haineuse ou contient des données qui rendent la propagande haineuse accessible — qui est emmagasinée et rendue accessible au public au moyen d’un ordinateur situé dans le ressort du tribunal, ordonner au gardien de l’ordinateur :
- de remettre une copie électronique de la matière au tribunal;
- de s’assurer que la matière n’est plus emmagasinée ni accessible au moyen de l’ordinateur; et
- de fournir les renseignements nécessaires pour identifier et trouver la personne qui a affiché la matière.
3. Méfait – Paragraphe 430(4.1)
Quiconque, étant motivé par des préjugés ou de la haine fondés sur la couleur, la race, la religion, l’origine nationale ou ethnique, l’âge, le sexe, l’orientation sexuelle, l’identité ou l’expression de genre ou la déficience mentale ou physique, commet un méfait à l’égard d’un bien visé à l’un ou l’autre des alinéas (4.101) a) à d), est coupable :
- soit d’un acte criminel passible d’un emprisonnement maximal de dix ans;
- soit d’une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire.
Définition de bien : tout ou partie
- d’un bâtiment ou d’une structure servant principalement au culte religieux – notamment une église, une mosquée, une synagogue ou un temple – ou d’un objet lié au culte religieux se trouvant dans un tel bâtiment ou d’une telle structure ou sur le terrain où ceux-ci sont érigés, ou d’un cimetière;
- d’un bâtiment ou d’une structure utilisée principalement par un groupe identifiable comme établissement d’enseignement – notamment une école, une garderie, un collège ou une université –, ou d’un objet lié à cet établissement d’enseignement se trouvant dans un tel bâtiment ou une telle structure ou sur le terrain où ceux-ci sont érigés;
- d’un bâtiment ou d’une structure servant principalement à la tenue, par un groupe identifiable, d’activités ou d’événements à caractère administratif, social, culturel ou sportif – notamment un hôtel de ville, un centre communautaire, un terrain de jeu ou un aréna –, ou d’un objet lié à une telle activité ou un tel événement se trouvant dans un tel bâtiment ou une telle structure ou sur le terrain où ceux-ci sont érigés;
- d’un bâtiment ou d’une structure utilisée principalement par un groupe identifiable comme résidence pour personnes âgées ou d’un objet lié à une telle résidence se trouvant dans un tel bâtiment ou une telle structure ou sur le terrain où ceux-ci sont érigés.
4. Thérapie de conversion – Paragraphe 320.101-104; 273.3(1)
D’autres dispositions pertinentes du Code criminel liées aux crimes fondés sur la haine ou les préjugés concernent notamment les thérapies de conversion.
Sécurité publique Canada a déclaré au début de l’année 2024 que le mouvement d’opposition aux questions de genre représentait une menace croissante et importante pour la sécurité nationale au Canada.
Aux termes du Code criminel, la thérapie de conversion s’entend d’une pratique, d’un traitement ou d’un service qui vise, selon le cas :
- à modifier l’orientation sexuelle d’une personne pour la rendre hétérosexuelle;
- à modifier l’identité de genre d’une personne pour la rendre cisgenre;
- à modifier l’expression de genre d’une personne pour la rendre conforme au sexe qui a été assigné à la personne à sa naissance;
- à réprimer ou à réduire toute attirance ou tout comportement sexuel non hétérosexuels;
- à réprimer toute identité de genre non cisgenre;
- à réprimer ou à réduire toute expression de genre qui ne se conforme pas au sexe qui a été assigné à une personne à sa naissance.
Il est entendu que la présente définition ne vise pas les pratiques, les traitements ou les services qui se rapportent à l’exploration ou au développement d’une identité personnelle intégrée — notamment ceux qui se rapportent à la transition de genre d’une personne — et qui ne sont pas fondés sur la supposition selon laquelle une quelconque orientation sexuelle, identité de genre ou expression de genre est à privilégier.
Thérapie de conversion – Paragraphe 320.102
Quiconque, sciemment, fait suivre une thérapie de conversion à une personne, notamment en lui fournissant de la thérapie de conversion, est coupable :
- soit d’un acte criminel passible d’un emprisonnement maximal de cinq ans; ou
- soit d’une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire.
Promotion ou publicité – Paragraphe 320.103
Quiconque, sciemment, fait la promotion de la thérapie de conversion ou fait de la publicité de thérapie de conversion est coupable :
- soit d’un acte criminel passible d’un emprisonnement maximal de deux ans; ou
- soit d’une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire.
Avantage matériel – Paragraphe 320.104
Quiconque bénéficie d’un avantage matériel, notamment pécuniaire, qu’il sait provenir ou avoir été obtenu, directement ou indirectement, de la prestation de thérapies de conversion est coupable :
- soit d’un acte criminel passible d’un emprisonnement maximal de deux ans; ou
- soit d’une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire.
Passage d’enfants à l’étranger (pour une thérapie de conversion) – Paragraphe 273.3(1)
Commet une infraction quiconque agit dans le but de faire passer à l’étranger une personne résidant habituellement au Canada et qui est âgée de moins de dix-huit ans, avec l’intention que soit commis à l’étranger un acte qui, s’il était commis au Canada, constituerait une infraction.
Quiconque comment l’infraction visée au présent article est coupable :
- soit d’un acte criminel passible d’un emprisonnement maximal de cinq ans; ou
- soit d’une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire.
Principes de détermination de la peine – 718.2(a)(i)
Le tribunal détermine la peine à infliger compte tenu également des principes suivants :
- la peine devrait être adaptée aux circonstances aggravantes ou atténuantes liées à la perpétration de l’infraction ou à la situation du délinquant; sont notamment considérées comme des circonstances aggravantes des éléments de preuve établissant :
- que l’infraction est motivée par des préjugés ou de la haine fondés sur des facteurs tels que la race, l’origine nationale ou ethnique, la langue, la couleur, la religion, le sexe, l’âge, la déficience mentale ou physique, l’orientation sexuelle ou l’identité ou l’expression de genre.
Comment le paragraphe 718.2 est-il appliqué?
Au prononcé de la peine, les tribunaux peuvent introduire l’idée que le suspect était motivé, au moins en partie, par la haine ou des préjugés. S’il est établi que le crime était motivé par la haine ou par des préjugés, le juge considérera qu’il s’agit d’un facteur aggravant et alourdira la peine à laquelle l’auteur de l’infraction sera condamné.
Par exemple, un suspect est arrêté pour agression, puis inculpé et condamné. Au prononcé de la peine, le paragraphe 718.2 est appliqué.
Il convient de noter que la disposition relative à la détermination de la peine comprend la mention « des facteurs tels que » suivant la liste des groupes identifiables, ce qui n’est pas le cas des autres dispositions du Code criminel relatives aux crimes haineux.
Lorsqu’ils enquêtent sur une infraction criminelle motivée au moins en partie par la haine, les enquêteurs sont tenus d’expliquer les éléments de l’infraction ainsi que les éléments de preuve qui démontrent que le crime était motivé par la haine.
Principes de détermination de la peine – Rapport au procureur de la Couronne
Veiller à ce que le procureur de la Couronne soit informé que les infractions sont motivées par la haine ou les préjugés et que l’alinéa 718.2(1)a) du Code criminel pourrait s’appliquer.
En plus de répondre aux exigences habituelles associées aux rapports au procureur de la Couronne (RPC) et d’expliquer de façon précise les circonstances entourant l’infraction, les enquêteurs doivent ajouter une section intitulée paragraphe 718.2 - Principes de détermination de la peine pour les infractions motivées par la haine dans le Rapport au procureur de la Couronne (RPC) afin d’attirer l’attention de la Couronne et du juge, lors de la fixation de la peine, sur les actes et les comportements de l’auteur de l’infraction qui peuvent être considérés comme motivés par la haine ou les préjugés.
En rédigeant ce paragraphe, il faut :
- Expliquer que l’infraction a été motivée au moins en partie par la haine ou les préjugés;
- Consulter la partie Établissement du motif de la haine : Indicateurs clés des préjugés pour déterminer les motifs et les justifier.
- Résumer tous les éléments de preuve qui démontrent que l’infraction était motivée par la haine ou les préjugés et pourquoi cela devrait être considéré comme un facteur aggravant lors de la fixation de la peine :
- ces éléments de preuve peuvent être les déclarations de la victime, du témoin ou du suspect, des preuves matérielles (graffitis ou symboles de haine, dommages causés à une propriété, etc.), des preuves vidéo (la personne a été choisie parce qu’elle fait partie d’un groupe identifiable);
- Mentionner des facteurs tels que le langage et le ton, le choix des cibles, les incidents antérieurs ou les comportements similaires (incidents haineux).
L’objectif en est d’attirer l’attention de la Couronne et du juge, lors de la fixation de la peine, sur les actes et les comportements de l’auteur de l’infraction qui peuvent être considérés comme motivés par la haine ou les préjugés.
Recommandations en matière d’enquête
Les lignes directrices suivantes ont été élaborées pour faciliter la tenue d’enquêtes efficaces, professionnelles et centrées sur les victimes à la suite de crimes et d’incidents haineux :
- Offrir et obtenir les services d’un interprète si nécessaire pour faciliter la communication entre les parties et veiller à ce que la victime puisse s’exprimer au cours du processus.
- Rechercher tout indicateur de crime haineux pendant l’enquête.
- S’assurer que tous les éléments de preuve sont rassemblés, y compris les photographies et les objets saisis sur les lieux.
- Par exemple une bombe aérosol, des vidéos de surveillance, des appareils électroniques, des déclarations de victimes et de témoins, des enregistrements d’appels au 9-1-1.
- Envisager de faire appel à d’autres ressources policières (par exemple le Groupe des crimes haineux, le Service de l’identité judiciaire, les Relations avec les médias).
- Aviser son superviseur conformément aux politiques du territoire de compétence.
- Dans l’explication, rapporter exactement les mots prononcés, écrits ou autrement communiqués par le suspect.
- Se reporter à la politique de son service de police sur le signalement des crimes et incidents haineux.
- Si des accusations sont déposées, expliquer les motifs qui reposent sur la haine ou les préjugés partout où il est possible de le faire (résumé, Rapport au procureur de la Couronne, déclarations, etc.).
- Tirer parti des avantages d’une approche centrée sur la victime et tenant compte des traumatismes tout au long du processus d’enquête.
- Désigner un enquêteur chargé d’interroger la victime, dans la mesure du possible, afin de limiter le traumatisme.
- Tenir compte des préoccupations relatives à la sécurité des victimes :
- Parler avec la (les) victime(s) de leur(s) besoins et de leur(s) préférences en matière de soutien;
- Trouver des organismes locaux adaptés à la culture et sensibilisés aux traumatismes qui répondent aux besoins et aux préférences des victimes;
- Aider la(les) victime(s) à obtenir les services et le type de soutien qu’elle(s) privilégient.
- Informer la victime de ce à quoi elle peut s’attendre et lui fournir les coordonnées nécessaires pour faciliter le suivi; veiller à ce qu’un suivi rigoureux soit assuré auprès de la victime et de la communauté (au besoin) tout au long de l’enquête et du processus judiciaire.
- Encourager les victimes à remplir une Déclaration de la victime (art. 722) et les membres de la collectivité à remplir une déclaration au nom d’une collectivité (art. 722.2).
- Envisager d’autres infractions, notamment liées à un engagement de ne pas troubler l’ordre public (par. 810 du Code criminel) ou une initiative de justice réparatrice dans des circonstances exceptionnelles s’il y a lieu.
- Les programmes de réinsertion peuvent être bénéfiques pour les auteurs récidivistes d’incidents haineux, dans la mesure où de tels programmes sont offerts.
- Envisager de soutenir la victime et sa collectivité en proposant des ressources et stratégies de prévention de la criminalité, à l’interne ou à l’externe (par exemple, le Programme de financement des projets d’infrastructure de sécurité pour les collectivités à risque de Sécurité publique Canada).
- Dans les situations qui comportent une infraction contre des biens (par exemple, des symboles racistes peints au pistolet sur un mur ou une structure), communiquer avec le propriétaire ou le gestionnaire de l’installation afin de s’assurer que les éléments de preuve matériels seront rapidement supprimés ou éliminés une fois qu’ils auront été consignés.
- Pour les cas qui pourraient avoir une incidence nationale ou qui impliquent des situations en cours qui constituent une menace pour la sécurité publique dans son ensemble (au-delà du territoire de compétence), l’information doit être transmise par les voies nationales de communication des renseignements afin d’assurer une intervention coordonnée et d’atténuer toute préoccupation en matière de sécurité pour la communauté en général (par exemple, communiquer avec l’Équipe intégrée de la sécurité nationale de la GRC).
- Se familiariser avec la Charte canadienne des droits des victimes.
- Mobiliser les ressources communautaires qui sont en contact avec le groupe cible afin d’obtenir des conseils et des informations sur les coutumes et les traditions.
Conclusion
En plus d’enquêter sur les crimes et incidents haineux, la police joue un rôle primordial dans la transmission d’information importante aux victimes, l’aide apportée à ces dernières et leur accès à des services de soutien adaptés à leurs besoins. La qualité des contacts avec la police peut influer sur la perception qu’aura la victime de tout le système de justice pénale, ce qui peut influer sur sa volonté de coopérer, de donner de l’information et de participer au processus de justice pénale en général.
Les incidents et crimes haineux ciblent intentionnellement et précisément des personnes en raison de certaines caractéristiques de leur identité. Par conséquent, ces crimes sont très personnels et ont de profonds effets négatifs sur les victimes et leur communauté. Une intervention policière robuste, bienveillante et immédiate offre aux victimes une aide importante, mais permet aussi d’améliorer les relations et la confiance entre la police et les communautés, et donc d’accroître les signalements, d’améliorer les enquêtes et, par le fait même, d’augmenter la probabilité que les auteurs de crimes haineux soient poursuivis en justice et condamnés.
Ouvrages cités
SCHWEPPE, Jennifer et Barbara PERRY. « A Continuum of Hate : Delimiting the Field of Hate Studies », Crime, Law and Social Change, vol. 77, no 5 (2021), p. 511. PICKLES, James. « Sociality of Hate: The Transmission of Victimization of LGBT+ People Through Social Media », International Review of Victimology, vol. 27, no 3 (2020), p. 313.
Certaines informations contenues dans cette section sont reproduites ou adaptées à partir du Centre des politiques d’application de la loi de l’Association internationale des chefs de police. (2021) Investigation of Hate Crimes (disponsible en anglais seulement, PDF, 2 900 ko); Association internationale des chefs de police et Lawyers’ Committee for Civil Rights Under Law. (2019). Action Agenda for Community Organizations and Law Enforcement to Enhance the Response to Hate Crimes (disponsible en anglais seulement, PDF, 1 557 ko).
GOODMAN, Diane, Blanche TAX et Zahura MAHAMED. « UNHCR’s Journey Towards a Victim-Centred Approach » (disponsible en anglais seulement), Humanitarian Practice Network, no 81 (17 juin 2022), (consulté le 26 août 2023). ASSOCIATION INTERNATIONALE DES CHEFS DE POLICE. « Response to Victims of Crime » (disponsible en anglais seulement, compte nécessaire), (août 2018a), (consulté le 28 juillet 2023).
THIARA, Ravi K. et Gill HAGUE. « Disabled Women and Domestic Violence: Increased Risk but Fewer Services », dans Disability, Hate Crime and Violence: Routledge (édité par ROULSTON, Alan et Hannah Mason-Bish), 2013, p. 106 à 117. CRENSHAW, Kimberle. « Mapping the Margins : Intersectionality, Identity Politics, and Violence Against Women of Color », Stanford Law Review, vol. 43, no 6 (1991), p. 1241 à 1299.
Charte canadienne des droits des victimes, L.C. 2015, chap. 13, art. 2.
Office of Justice Programs : Office for Victim’s of Crime. Achieving Excellence : Model Standards for Serving Victims and Survivors of Crime (disponsible en anglais seulement), 2023, glossaire, (consulté le 23 août 2023).
IES, Lieve, Mayuri GOGOI, Christopher D. BAYLISS, Manish PAREEK, Adam WEBB, Neil CHAKRABORTI et Emily WERTANS. « Hate Crime during the COVID-19 Pandemic: A Qualitative Study of the Experiences of an Ethnically Diverse University Student Population », COVID 3, no 2 (2023), p. 152 à 154. ORGANISATION POUR LA SÉCURITÉ ET LA COOPÉRATION EN EUROPE. BUREAU DES INSTITUTIONS DÉMOCRATIQUES ET DES DROITS DE L’HOMME. Understanding the Needs of Hate Crime Victims, 2020, p. 11 à 13. ASSOCIATION INTERNATIONALE DES CHEFS DE POLICE. « Response to Victims of Crime », 2018a.
Certaines informations contenues dans cette section sont reproduites ou adaptées à partir du Centre des politiques d’application de la loi de l’Association internationale des chefs de police. (2021) Investigation of Hate Crimes (disponsible en anglais seulement, PDF, 2 900 ko); Organization for Security and Cooperation in Europe. (2019). Using Bias Indicators : A Practical Tool for Police (disponsible en anglais seulement, PDF, 154 ko); Association internationale des chefs de police et Lawyers’ Committee for Civil Rights Under Law. (2019). Action Agenda for Community Organizations and Law Enforcement to Enhance the Response to Hate Crimes (disponsible en anglais seulement); Peel Regional Police. (2018). Hate Motivated Crimes and Incidents Guidebook. Prepared by Equity and Inclusion Bureau (disponsible en anglais seulement).
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