Rapport annuel 2023 Instructions visant à éviter la complicité dans les cas de mauvais traitements infligés par des entités étrangères
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Liste des acronymes et abréviations
- CCRIE
- Le Comite consultatif sur les risques - Information de l’étranger
- GEAL
- Le Groupe d’évaluation de l’application de la loi
- GRC
- Gendarmerie Royale du Canada
Introduction
Entrée en vigueur le 13 juillet 2019, la Loi visant à éviter la complicité dans les cas de mauvais traitements infligés par des entités étrangères (la Loi) autorise le gouverneur en conseil à donner aux administrateurs généraux des instructions écrites concernant :
- la divulgation de renseignements à une entité étrangère qui entraînerait un risque substantiel de mauvais traitements à l’égard d’une personne;
- la formulation de demandes auprès d’une entité étrangère pour obtenir des renseignements qui entraînerait un risque substantiel de mauvais traitements à l’égard d’une personne;
- l’utilisation de renseignements susceptibles d’avoir été obtenus à la suite de mauvais traitements infligés à une personne par une entité étrangère.
Le 4 septembre 2019, en vertu du paragraphe 3(1) de la Loi, le gouverneur en conseil, sur recommandation du ministre de la Sécurité publique du Canada, a donné à la commissaire de la GRC des Instructions visant à éviter la complicité dans les cas de mauvais traitements infligés par des entités étrangères (les Instructions). Conformément au paragraphe 7(1) de la Loi, le commissaire doit, avant le 1er mars, remettre au ministre un rapport annuel faisant état de la mise en œuvre de ces instructions au cours de l’année civile précédente.
Le présent rapport porte sur la mise en œuvre par la GRC des Instructions pour la période du 1er janvier au 31 décembre 2023. Il présente de l’information sur les pratiques de la GRC en matière d’échange de renseignements, les modifications apportées aux rapports d’évaluation des risques posés par une entité et la formation interne sur les Instructions et le processus lié au Comité consultatif sur les risques – Information de l’étranger (CCRIE).
Contexte
L’échange de renseignements avec des entités nationales et étrangères est essentiel à la bonne exécution du vaste mandat de la GRC. Les échanges de renseignements peuvent aller de simples demandes visant à confirmer si une personne a un casier judiciaire à des notifications urgentes indiquant qu’un suspect peut constituer une menace pour lui-même ou pour autrui. Les bons échanges peuvent aussi appuyer les poursuites pénales ou la perturbation d’activités criminelles.
La GRC s’engage à veiller à ce que les renseignements qu’elle échange avec des entités étrangères n’aient pas été obtenus par le biais de mauvais traitements ou ne donnent pas lieu à de mauvais traitements. La GRC accorde la plus haute importance à ce sujet, puisque le fait d’éviter d’être complice de mauvais traitements est une valeur canadienne fondamentale et que, pour que des renseignements servent d’éléments de preuve devant les tribunaux canadiens, ils ne peuvent avoir été obtenus à la suite de mauvais traitements (ou faire l’objet d’allégations de mauvais traitements). Pour être utiles dans le cadre de poursuites pénales, les renseignements doivent être traités et obtenus conformément aux lois canadiennes, notamment la Charte canadienne des droits et libertés et la Loi sur la protection des renseignements personnels. Des renseignements obtenus à la suite de mauvais traitements seraient contraires à ces principes, et les utiliser comme éléments de preuve nuirait non seulement à l’enquête, mais aussi à la réputation de la GRC et du gouvernement du Canada.
Pratiques en matière d’échange de renseignements
Conformément aux Instructions de 2019, la GRC doit tenir compte du risque de mauvais traitements avant de divulguer ou d’utiliser des renseignements d’entités étrangères ou de présenter une demande à ces dernières pour obtenir des renseignements. S’il existe un risque substantiel de mauvais traitements, l’échange de renseignements doit être acheminé au CCRIE de la GRC.
Le CCRIE établit une stratégie d’examen systématique des échanges de renseignements là où il existe un risque sérieux de mauvais traitements. Conformément à la Loi et aux Instructions, il se penche sur le contexte opérationnel de chaque demande, l’application de stratégies d’atténuation des risques et la force des garanties, et formule des recommandations selon que le risque peut être suffisamment atténué au commissaire adjoint ou directeur exécutif responsable.
Lorsqu’un dossier est soumis au CCRIE, celui-ci se pose les questions clés suivantes :
- Existe-t-il un risque substantiel de mauvais traitements si les renseignements sont échangés ou est-il possible que les renseignements ont été obtenus à la suite de mauvais traitements?
- Quelles sont les mesures proposées pour atténuer le risque et quelles sont les chances de succès (par exemple, garanties diplomatiques)?
- Le fait de donner suite ou non à l’échange menacera-t-il la sécurité nationale ou d’autres intérêts canadiens? Si tel est le cas, quelle est la véracité de la menace?
Les recommandations du CCRIE sont formulées par l’un des co-présidents, selon les conseils des membres du comité, et les opinions dissidentes sont consignées dans le compte rendu des décisions, qui est présenté au responsable désigné (le commissaire adjoint ou le directeur exécutif) et versé au dossier d’enquête. Lorsque le responsable désigné n’est pas en mesure de déterminer si le risque peut être atténué ou si l’utilisation des renseignements vraisemblablement obtenus au moyen de mauvais traitements est nécessaire pour empêcher des décès ou des blessures graves, il doit faire parvenir le compte rendu des décisions au sous-commissaire compétent, qui s’en remettra à la décision du commissaire.
Conformément aux Instructions, lorsque le commissaire est appelé à trancher sur des questions données, il doit étayer sa décision et les mesures d’atténuation prises (mises en garde, garanties, mesures, etc.). Si un échange de renseignements est approuvé par le commissaire, il doit être accompagné de la caractérisation par la GRC de l’exactitude et de la fiabilité des renseignements.
Le commissaire doit par la suite informer le ministre de la Sécurité publique, des Institutions démocratiques et des Affaires intergouvernementales, l’Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement, le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement, et la Commission civile d’examen et de traitement des plaintes relatives à la GRC de toute décision prise et leur communiquer l’information ayant servi à y parvenir.
Mise en œuvre des Instructions
Élaboration de politiques nationales
La GRC en est toujours aux dernières étapes de l’élaboration de ses politiques nationales améliorées de supervision et d’orientation, qui visent à mieux appuyer l’application uniforme des Instructions. Les politiques à jour fourniront aux personnes concernées des lignes directrices sur les rôles et les responsabilités en ce qui a trait aux échanges de renseignements avec l’étranger, ainsi que les facteurs et les seuils qui déclenchent le processus lié au CCRIE. Une fois achevées, elles seront accessibles dans le site Web interne de la GRC, de même que des renseignements sur la formation. Une campagne d’information, qui comprendra des communications officielles, sera également lancée.
On s’attend à une évolution de la stratégie adoptée par la GRC à l’égard des Instructions grâce à sa collaboration soutenue avec des intervenants internes, à la suite d’examens réalisés par des organismes de surveillance, de même que par des consultations continues avec d’autres ministères et organismes du gouvernement fédéral qui sont également assujettis aux Instructions.
Groupe de coordination du CCRIE : orientation stratégique, information et formation
Le Groupe de coordination du CCRIE fournit au Comité et au personnel opérationnel des conseils et du soutien sur l’application de la Loi, supervise la tenue des documents de réunion du CCRIE, cerne les questions stratégiques relatives aux processus, fait part au groupe d’évaluation de l’application de la loi (GEAL) des résultats obtenus afin d’évaluer le risque continuellement de manière informée et discute avec les partenaires fédéraux externes pour échanger et incorporer des pratiques exemplaires.
En 2022, la GRC a commencé à offrir à ses membres un cours de base intitulé Éviter la complicité dans les cas de mauvais traitements infligés par des entités étrangères, accessible à partir de la plateforme de formation en ligne AGORA. À ce jour, 630 personnes ont réussi ce cours.
Évaluations de l’application de la loi
Depuis 2022, le GEAL relève des Services spéciaux internationaux. Il est responsable d’évaluer les pays étrangers et leurs entités d’application de la loi en fonction des critères énoncés dans la Loi afin de cerner des questions ou des situations qui pourraient entraîner de mauvais traitements. L’évaluation du risque de mauvais traitements a pour but de contribuer à établir le niveau de risque posé dans le contexte de l’échange de renseignements avec des entités étrangères particulières.
Les profils des pays renseignent le personnel de la GRC sur les niveaux de risque associés à des entités étrangères particulières et contribuent à déterminer s’il existe un risque substantiel de mauvais traitements en lien avec une affaire. Les profils des cinq premiers pays apparaissant chaque année dans les demandes du CCRIE sont mis à jour régulièrement. Les autres profils sont mis à jour au besoin. Le GEAL se réunira si le CCRIE décide qu’un profil doit être réévalué ou si un changement dans la situation politique ou diplomatique nécessite la mise à jour d’un profil.
De plus, le GEAL a participé au groupe de coordination d’échange de renseignements dirigé par Sécurité publique, chargé d’appuyer la collaboration et les pratiques en matière d’échange de renseignements au sein de la collectivité de la sécurité et du renseignement.
Rapport d’activité : du 1er janvier 2023 au 31 décembre 2023
Pendant la période visée par le rapport, la GRC n’a pas relevé de cas où les Instructions ont eu des répercussions significatives sur ses activités opérationnelles, c’est-à-dire des cas où le risque substantiel n’a pas pu être atténué, et où la GRC n’a pas été en mesure de divulguer de l’information qui aurait pu prévenir des blessures ou des décès, ou encore des situations où une opération nationale a échoué parce que la GRC n’a pas pu échanger ou utiliser des renseignements.
Entre le 1er janvier et le 31 décembre 2023, la GRC a présenté 43 échanges de renseignements au CCRIE. Il n’y a eu aucun cas où les responsables n’ont pas été en mesure de déterminer si les risques de mauvais traitements pouvaient être suffisamment atténués et qui a nécessité la transmission du dossier au commissaire conformément aux Instructions.
Secteurs d’intervention de la GRC en 2024
En s’appuyant sur les travaux visant à améliorer ses procédures internes, la GRC examinera les meilleurs moyens de surveiller les résultats des échanges, ce qui revêt une grande importance pour son évaluation continue des risques. Elle demeure également résolue à mettre en place un processus de contrôle de la conformité, à achever les politiques du CCRIE et à mieux faire connaître les obligations de la GRC en vertu de la Loi.
Le CCRIE et le GEAL se réuniront afin de se pencher sur des questions stratégiques, d’améliorer le processus et les procédures, et de prioriser les travaux conjoints.
Conclusion
La GRC continuera de tirer parti des mécanismes en place, notamment le groupe de coordination d’échange de renseignements dirigé par Sécurité publique, afin d’améliorer les politiques et les procédures qui ont trait à la mise en œuvre des Instructions. La GRC poursuivra ses efforts d’information et de formation du personnel afin d’assurer le respect de la Loi et des valeurs canadiennes.
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